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Publié le 25 septembre 2014 par Soulier Avocats

Loi Pinel : Réforme des baux commerciaux

La Loi Pinel rénove le régime des baux commerciaux, notamment en limitant les hausses de loyers et les cas de renonciation à la faculté de résiliation triennale, en instaurant une obligation de transparence à l’égard du locataire, et en instituant un droit de préférence au profit de ce dernier en cas de vente des locaux qu’il occupe.

Bien que son objectif déclaré soit d’améliorer la situation locative des très petites entreprises (TPE), cette loi va concerner les entreprises de toute taille locataires ou bailleurs de locaux commerciaux ou industriels.

Entrée en vigueur le 20 juin 2014, la loi n°2014-626 du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, dite « Loi Pinel », apporte, en son titre premier, d’importantes modifications au statut des baux commerciaux, notamment en matière de :

1. Loyers : limitation des ajustements applicables en cas de renouvellement ou de révision.

1.1. Encadrement des variations de loyer lors du renouvellement

L’article L.145-34 du Code de commerce prévoit désormais que le plafonnement du loyer du bail renouvelé doit être calculé sur la base de l’indice trimestriel des loyers commerciaux (ILC) ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires (ILAT), et non plus sur la base de l’indice du coût de la construction (ICC).

L’article L.145-34 du Code de commerce prévoit en outre (i) qu’en cas de modification notable des caractéristiques du local considéré, de la destination des lieux, des obligations respectives des parties, et des facteurs locaux de commercialité, ou (ii) que s’il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d’une clause du contrat relative à la durée du bail, la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente.

Ces dispositions n’ont toutefois pas vocation à s’appliquer aux baux (i) de terrains, (ii) de locaux construits en vue d’une seule utilisation et (iii) de locaux à usage exclusif de bureaux.

1.2. Encadrement des variations de loyer lors de la révision triennale

De la même manière, l’article L.145-38 du Code de commerce dispose désormais qu’à moins que ne soit rapportée la preuve d’une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10% de la valeur locative, la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision triennale ne peut excéder la variation de l’ILC ou de l’ILAT, intervenue depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer.

Dans le cas où cette preuve est rapportée, la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente.

Par dérogation à ce qui précède, si le bail est assorti d’une clause d’échelle mobile, la révision peut être demandée chaque fois que, par le jeu de cette clause, le loyer se trouve augmenté ou diminué de plus de 25% par rapport au prix précédemment fixé contractuellement ou par décision judiciaire.

La variation de loyer qui découle de cette révision ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10% du loyer acquitté au cours de l’année précédente.

2. Durée du bail : limitation des cas de renonciation à la faculté de résiliation triennale.

L’article L145-4 du Code de commerce prévoit désormais que le preneur ne peut renoncer à la faculté de donner congé à l’expiration d’une période triennale qu’en présence d’un bail (i) conclu pour une durée supérieure à neuf ans, ou (ii) portant sur des locaux construits en vue d’une seule utilisation (locaux dits « monovalents »), (iii) à usage exclusif de bureaux ou (iv) de stockage, tels que mentionnés au 3° du III de l’article 231 ter du Code général des impôts.

La conclusion de baux dits « fermes » est donc aujourd’hui limitée et ne pourra être envisagée que dans les cas limitativement énumérés par l’article L145-4 du Code de commerce.

3. Charges, impôts, taxes et travaux : obligation de communication préalable et périodique à la charge du bailleur.

3.1. Charges, impôts et taxes : obligation de communication préalable, annuelle et ponctuelle à la charge du bailleur

L’article L.145-40-2 du Code de commerce, créé par la Loi Pinel, dispose que tout contrat de location doit comporter un inventaire précis et limitatif des catégories de charges, impôts, taxes et redevances liés à ce bail, comportant l’indication de leur répartition entre le bailleur et le locataire.

Cet inventaire donne ensuite lieu à un état récapitulatif annuel.

En cours de bail, le bailleur a l’obligation d’informer le locataire des nouvelles charges, impôts, taxes et redevances.

3.2. Travaux : obligation de communication préalable et triennale à la charge du bailleur

Lors de la conclusion du contrat de location, puis tous les trois ans, le bailleur doit désormais communiquer au locataire (i) un état prévisionnel des travaux qu’il envisage de réaliser dans les trois années suivantes, (ii) un budget prévisionnel, (iii) ainsi qu’un état récapitulatif des travaux qu’il a réalisés dans les trois années précédentes, en précisant leur coût.

3.3. Charges, impôts, taxes et travaux : cas de l’ensemble immobilier

Dans un ensemble immobilier comportant plusieurs locataires, le contrat de location doit désormais préciser la répartition des charges ou du coût des travaux entre les différents locataires occupant cet ensemble, cette répartition devant être fonction de la surface exploitée.

Le montant des impôts, taxes et redevances pouvant être imputés au locataire doit en outre correspondre strictement au local occupé par chaque locataire et à la quote-part des parties communes nécessaires à l’exploitation des locaux loués.

En cours de bail, le bailleur a l’obligation d’informer les locataires de tout élément susceptible de modifier la répartition des charges entre ces derniers.

4. Droit de préférence au profit du locataire en cas de vente du local commercial occupé

A l’image de ce qui est prévu par la loi du 6 juillet 1989 en matière de baux d’habitation, l’article L.145-46-1 du Code de commerce, également introduite par la Loi Pinel, impose au propriétaire d’un local à usage commercial ou artisanal désireux de vendre celui-ci d’en informer le locataire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement. Cette notification doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente envisagée. Elle vaut offre de vente au profit du locataire.

Ce dernier dispose ensuite d’un délai d’un mois à compter de la réception de cette offre pour se prononcer.

En cas d’acceptation, le locataire dispose, à compter de la date d’envoi de sa réponse au bailleur, d’un délai de deux mois pour la réalisation de la vente, quatre mois si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt.

Si, à l’expiration de ce délai, la vente n’a pas été réalisée, l’acceptation de l’offre de vente est sans effet.

Cette procédure doit également être suivie lorsque le propriétaire décide de vendre à des conditions ou à un prix plus avantageux pour l’acquéreur. Dans cette hypothèse, le notaire doit, lorsque le bailleur n’y a pas préalablement procédé, notifier au locataire dans les mêmes conditions, ces conditions et ce prix, à peine de nullité de la vente. Cette notification vaut offre de vente au profit du locataire.

Ce nouveau droit de préférence n’a toutefois pas vocation à s’appliquer dans les cas suivants : (i) cession unique de plusieurs locaux d’un ensemble commercial, (ii) cession unique de locaux commerciaux distincts, (iii) cession d’un local commercial au copropriétaire d’un ensemble commercial, (iv) cession globale d’un immeuble comprenant des locaux commerciaux, et (v) cession d’un local au conjoint du bailleur, à un ascendant ou à un descendant du bailleur ou de son conjoint.

Sous réserve de ce qui précède, ces nouvelles dispositions seront applicables à toute cession d’un local intervenant à compter du 18 décembre 2014.

5. Bail dérogatoire : allongement de la durée de 2 à 3 ans et instauration d’un délai de respiration à l’expiration du bail.

L’article L145-5 du Code de commerce prévoit désormais que les parties peuvent, lors de l’entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions applicables aux baux commerciaux sous réserve que la durée totale du bail ou des baux successifs ne soit pas supérieure à trois ans, et non plus deux ans.

A l’expiration de cette durée, les parties ne peuvent plus conclure un nouveau bail dérogeant aux dispositions applicables aux baux commerciaux pour exploiter le même fonds dans les mêmes locaux.

Enfin, la conversion en bail commercial à l’expiration de cette durée n’est plus automatique : les parties disposent en effet d’un délai d’un mois à compter de l’échéance pour procéder à la libération des lieux.

6. Convention d’occupation précaire : confirmation de la définition jurisprudentielle.

Création prétorienne, la convention d’occupation précaire est désormais définie à l’article L.145-5-1 du Code de commerce, qui reprend les termes autrefois employés par la Cour de cassation (voir notamment Cass. civ. 3ème, 19 nov. 2003, n°02-15.887). Ainsi, la convention d’occupation est désormais caractérisée, quelle que soit sa durée, par le fait que l’occupation des lieux n’est autorisée « qu’à raison de circonstances particulières indépendantes de la seule volonté des parties ».

7. Encadrement des modalités d’entrée et de sortie : instauration d’une obligation d’établir un état des lieux.

L’article L145-40-1 dispose désormais que lors de la prise de possession des locaux par le locataire en cas de conclusion d’un bail, de cession du droit au bail, de cession ou de mutation à titre gratuit du fonds et lors de la restitution des locaux, un état des lieux est établi contradictoirement et amiablement par le bailleur et le locataire ou par un tiers mandaté par eux. L’état des lieux est joint au contrat de location ou, à défaut, conservé par chacune des parties.

Si l’état des lieux ne peut être établi dans les conditions susvisées, il est réalisé par un huissier de justice, sur l’initiative de la partie la plus diligente, à frais partagés par moitié entre le bailleur et le locataire.

A défaut, le bailleur ne peut invoquer la présomption de l’article 1731 du Code civil, en vertu de laquelle le preneur est présumé avoir reçu les locaux en bon état de réparations locatives.

8. Assouplissement des modalités de délivrance du congé : possibilité de mettre fin au bail par LRAR.

Il est désormais possible de mettre fin au bail soit par acte extrajudiciaire, soit par lettre recommandée avec avis de réception. A noter toutefois que la demande de renouvellement et la réponse du bailleur à cette demande doivent toujours être effectuées par acte extrajudiciaire.