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Publié le 1 décembre 2013 par Soulier Avocats

Conditions de validité d’une clause de non-concurrence souscrite à l’ occasion d’une cession de droits sociaux

La Cour de cassation vient de rappeler, dans un arrêt en date du 8 octobre 2013[1], les conditions de validité d’une clause de non-concurrence souscrite à l’occasion d’une cession de droits sociaux : 

  1. Une telle clause est licite à l’égard des associés ou actionnaires qui la souscrivent, dès lors qu’elle est limitée dans le temps et dans l’espace et proportionnée aux intérêts légitimes à protéger ; 
  2. Sa validité n’est subordonnée à l’existence d’une contrepartie financière que dans le cas où ces associés ou actionnaires avaient, à la date de leur engagement, la qualité de salariés de la société qu’ils se sont engagés à ne pas concurrencer. 

En l’espèce, un protocole de cession de titres d’une société G comportant une clause de non-concurrence à la charge des cédants avait été conclu en février 2007. En avril 2007, l’un des cédants, M. G., était devenu salarié de ladite société G et avait signé en cette qualité une seconde clause de non-concurrence, moyennant le versement d’une indemnité. Peu de temps après avoir cessé ses fonctions au sein de la société G et été libéré de son engagement de non-concurrence prévu aux termes de son contrat de travail, M. G. avait constitué une société exerçant une activité identique à celle de la société G. 

Se prévalant de la violation de la clause de non-concurrence contenue dans le protocole de cession de titres susvisé, la société G avait fait assigner M. G. et la société nouvellement constituée en vue d’obtenir la cessation de cette activité et l’indemnisation du préjudice ainsi subi.

Pour rejeter ces demandes, la Cour d’appel d’Orléans[2] avait retenu la nullité de cette clause, du fait de l’absence de compensation financière. 

La Cour de cassation se prononce finalement en faveur de M. G., au visa des articles 1131 et 1134 du Code civil[3] et affirme : 

« Attendu qu’en statuant ainsi, après avoir constaté qu’à la date du protocole de cession prévoyant l’engagement de non-concurrence, M. G. avait la seule qualité d’associé et n’était devenu salarié que postérieurement à la conclusion du protocole prévoyant cet engagement, la Cour d’appel a violé les textes susvisés. » 

Cette solution n’est pas nouvelle : elle fait suite à un célèbre arrêt rendu par la Cour de cassation en 2011[4]. La Haute Juridiction avait alors énoncé : 

« Attendu que lorsqu’elle a pour effet d’entraver la liberté de se rétablir d’un salarié, actionnaire ou associé de la société qui l’emploie, la clause de non-concurrence signée par lui n’est licite que si elle est indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise, limitée dans le temps et dans l’espace, qu’elle tient compte des spécificités de l’emploi du salarié et comporte l’obligation pour la société de verser à ce dernier une contrepartie financière, ces conditions étant cumulatives. » 

En l’espèce, le débiteur de la clause de non-concurrence litigieuse était à la fois associé et salarié de la société.

La décision commentée confirme cette position et précise à tout fins utiles que la validité d’une clause de non-concurrence souscrite à l’occasion d’une cession de droits sociaux n’est subordonnée à l’existence d’une contrepartie financière que dans le cas où ces associés ou actionnaires avaient, à la date de leur engagement, la qualité de salariés de la société qu’ils se sont engagés à ne pas concurrencer.

 


[1] Cass. com., 8 oct. 2013, n°12-25.984.

[2] CA Orléans, 19 juill. 2012. 

[3] Code civil, article 1131 : « l’obligation sans cause, ou sur une fausse cause, ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet. » 

Code civil, article 1134 : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi. » 

[4] Cass. com., 15 mars 2011, n°10-13.824.