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Publié le 1 novembre 2010 par Jean-Luc Soulier

Suite et fin du feuilleton des délégations de pouvoir dans les SAS

Dans le précédent numéro de notre e-newsletter nous annoncions la fin prochaine du feuilleton des délégations de pouvoir dans les SAS (consulter l’article).

C’est chose faite, la Cour de cassation ayant inscrit le mot fin par deux arrêts de principe du 19 novembre 2010 (n° 268 et 269).

Ces décisions cassent et annulent les arrêts de la deuxième chambre de la Cour d’appel de Paris des 5 novembre et 3 décembre 2009 rendus à l’occasion de procédures de licenciements.

Selon la Cour d’appel de Paris, les délégations de pouvoir au sein des SAS devaient être autorisées dans les statuts en application de l’article L. 227-6 du code de commerce aux termes duquel la SAS est représentée à l’égard des tiers par un président dont les pouvoirs peuvent être délégués à un directeur général délégué lorsque les statuts le prévoient.

Toute délégation de pouvoir non expressément autorisée par les statuts était donc nulle.

La conséquence dans les deux espèces était que les licenciements prononcés par des personnes responsables ne disposant pas d’une délégation de pouvoir inscrite dans les statuts étaient nuls.

Nous avons souligné dans notre précédent article  qu’une telle jurisprudence, si elle était confirmée par la Cour de cassation, n’affecterait pas seulement les conditions de validité d’une décision de licenciement prise par un directeur des ressources humaines mais également toutes les délégations de pouvoirs consenties dans les SAS n’ayant pas été autorisées dans les statuts.

Les responsables de SAS pousseront un « ouf ! » de soulagement à la lecture des attendus des arrêts de principe de la Cour de cassation du 19 novembre 2010 rendus par une chambre mixte composée de la deuxième chambre civile, de la chambre commerciale, financière et économique et de la chambre sociale afin de lever définitivement l’hypothèque qui pesait sur les SAS depuis un an.

Le même attendu figure à l’identique dans les deux arrêts s’agissant de la question de l’interprétation de l’article L. 227-6 du code de commerce :

« Si, selon [l’article L. 227-6 du code de commerce], la société par action simplifiée est représentée à l’égard des tiers par son président et, si ses statuts le prévoient, par un directeur général ou un directeur général délégué dont la nomination est soumise à publicité, cette règle n’exclut pas la possibilité, pour ces représentants légaux, de déléguer le pouvoir d’effectuer des actes déterminés tel que celui d’engager ou de licencier les salariés de l’entreprise. »

L’arrêt n° 268 concernait une espèce où le licenciement avait été prononcé par un directeur de ressources humaines ne disposant pas d’une délégation écrite.

La Cour répond ainsi à la question majeure de savoir si un responsable des ressources humaines dispose de manière implicite du pouvoir de licencier du seul fait de ses fonctions :

« Attendu qu’aucune disposition n’exige que la délégation du pouvoir de licencier soit donnée par écrit ; qu’elle peut être tacite et découler des fonctions du salarié qui conduit la procédure de licenciement ; Attendu que pour dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, l’arrêt retient l’absence de qualité à agir de la signataire de la lettre de licenciement ; Qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constations que la lettre de licenciement avait été signée par la personne responsable des ressources humaines de la société, chargée de la gestion du personnel et considérée de ce fait comme étant délégataire du pouvoir de licencier, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constations, a violé les textes susvisés. »

Cette décision met un point final au débat sur l’étendue des pouvoirs des responsables des ressources humaines au sein des sociétés commerciales, quelle que soit leur forme.

L’arrêt n° 269 va plus loin puisqu’il admet qu’en cas de dépassement de pouvoir par le mandataire (on peut supposer qu’il ne s’agissait pas en l’espèce d’un directeur des ressources humaines), le mandant peut ratifier a posteriori de manière expresse ou tacite l’acte du mandataire, manifestant ainsi la volonté claire et non équivoque de la société de licencier.  On peut imaginer qu’une telle solution à vocation à couvrir d’autres actes que celui de licencier.

De nouveaux débats en perspective.