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Publié le 1 août 2012 par Soulier Avocats

Les nouvelles dispositions relatives au harcèlement sexuel

Comme indiqué dans notre e-newsletter de mai 2012, le Conseil Constitutionnel, statuant sur une Question Prioritaire de Constitutionnalité déposée par André Soulier concernant l’application de l’article 222-33 du Code pénal réprimant le délit de harcèlement sexuel, avait abrogé ledit article le 4 mai 2012.

Le Conseil avait considéré que l’article en question méconnaissait le principe de légalité des délits et des peines, sa définition n’étant pas rédigée en termes suffisamment clairs et précis.

Après trois mois de vide juridique, la loi n° 2012-954 sur le harcèlement sexuel est entrée en vigueur le 8 août. Le Ministère de la Justice a publié dès le 7 août une circulaire commentant les principales dispositions de la loi.

Les nouvelles dispositions légales :

L’article 222-33 du Code pénal est dorénavant rédigé comme suit :

« I. Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

II. Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.

III. Les faits mentionnés au I et II sont punis de deux ans d’emprisonnement et de 30.000 € d’amende. 

Ces peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et 45.000 € d’amende lorsque les faits sont commis :

  • Par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;
  • Sur un mineur de quinze ans ;
  • Sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur ;
  • Sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur ;
  • Par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice. »

Il est complété par l’article 222-33-2 visant quant à lui les peines en matière de harcèlement moral, portées au niveau de celles applicables au harcèlement sexuel. Il dispose :

« Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende. »

Corrélativement, l’article L.1153-1 du Code du travail est dorénavant rédigé comme suit :

« Aucun salarié ne doit subir des faits :
1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. »

La loi du 6 août 2012 impose l’affichage dans les lieux de travail des articles 222-33 et 222-33-2 du code pénal, et l’affichage de l’article 222-33 dans les locaux ou à la porte des locaux où se fait l’embauche.

La nouvelle définition du harcèlement sexuel

L’article 222-33 du Code pénal donne une double définition du harcèlement sexuel.

a) Le harcèlement sexuel par actes répétés

Le délit sera constitué dès lors que des propos ou comportements:

  • ont une connotation sexuelle : le caractère explicitement et directement sexuel n’est pas nécessaire ;
  • sont répétés : c’est-à-dire au moins à deux reprises, sans nécessité d’un délai minimum les séparant ;
  • sont imposés : le non consentement de la victime n’aura pas à être express et explicite. Il sera apprécié par les juges selon le contexte et sur la base d’un faisceau d’indices. Il pourra notamment être déduit d’un silence permanent face aux agissements ou d’une demande d’intervention d’un collègue ou d’un supérieur ;
  • portent atteinte à la dignité de la victime en raison de leur caractère dégradant ou humiliant : il pourra s’agir de propos sexistes, grivois, obscènes, de gestes, d’attitudes, de provocations, injures ou diffamations commises en raison du sexe, de l’orientation ou de l’identité sexuelle de la victime ;
  • ou créent une situation intimidante, hostile ou offensante : sans porter atteinte à la dignité, les agissements en cause rendent insupportables les conditions de vie, de travail ou d’hébergement.

b) Le harcèlement par acte unique

Le harcèlement sexuel peut être constitué par un seul acte si celui-ci revêt une gravité particulière.

La pression sera exercée sur la victime en contrepartie d’une embauche, d’un bail, etc. ou pour éviter une menace de licenciement, mutation, augmentation de loyer, etc.

L’acte de nature sexuelle qui est recherché, en réalité ou en apparence peut-être de nature très variée. Il peut s’agir de simples contacts physiques destinés à provoquer ou accentuer le désir.

c) Les sanctions applicables

Les peines ont été doublées par rapport à celles prévues auparavant. Elles ont ainsi été portées à deux ans d’emprisonnement et à 30.000 euros d’amende.

Les circonstances aggravantes citées au III de l’article 222-33 du code pénal alourdissent les peines pour les porter à 3 ans d’emprisonnement et 45.000 euros d’amende.

La vulnérabilité économique est une innovation.

Les discriminations commises à la suite de harcèlements moral ou sexuel sont réintroduites dans le Code du travail.

Le Code pénal se voit complété par l’article 225-1-1- qui dispose : « constitue une discrimination toute distinction opérée entre les personnes parce qu’elles ont subi ou refusé de subir des faits de harcèlement sexuel (…) ou témoigné sur de tels faits. »

Ces actes discriminatoires sont passibles de 3 ans d’emprisonnement et de 45.000 euros d’amende.