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Publié le 1 janvier 2011 par Soulier Avocats

La loi de régulation bancaire et financière : la mise en oeuvre nationale du dispositif global de supervision du secteur financier

La loi de régulation bancaire et financière a été promulguée le 20 octobre 2010 et publiée au Journal Officiel le 23 octobre 2010.  Elle met en œuvre au niveau national les décisions arrêtées au cours des G20 de Washington, Londres et Pittsburgh et entend tirer les enseignements de la crise en vue de soutenir la reprise économique.

Cette loi comprend 92 articles qui s’articulent autour de deux grands axes principaux, en premier lieu la mise en place d’un dispositif de supervision de certains acteurs et de certaines activités et, en second lieu, le soutien du financement de l’économie pour accompagner la reprise.

De nombreux observateurs s’accordent aujourd’hui sur le caractère décevant et peu ambitieux de cette réforme. Il eut fallu selon certains que de telles décisions ne soient pas prises au niveau national mais traitées sur un plan international. Force est pourtant de constater, s’agissant de la France, que les derniers textes législatifs adoptés dans le domaine bancaire et financier s’inscrivent dans le prolongement direct des décisions entérinées au niveau international pour répondre au caractère mondialisé et global de la dernière crise.

L’occasion ici de rappeler les grandes décisions issues des derniers G20 dans le domaine de la supervision des acteurs et des marchés financiers et de relever les mesures prises au niveau national aux termes de la loi de régulation bancaire et financière du 23 octobre 2010 (la « Loi RBF »).

1. Régulation, contrôle et sanction des agences de notation de crédit

Les nouvelles régulations décidées au niveau international puis mises en place en Europe et en France  visent à réglementer certains acteurs financiers qui ne l’étaient pas ou qui l’étaient insuffisamment (Hedge funds et agences de notations) et à encadrer certaines activités jugées potentiellement dangereuses pour la stabilité financière (opérations dérivées et ventes à découvert).

La crise financière de 2007 a mis en lumière la situation insatisfaisante du droit en matière de notation de crédit.

C’est lors du G20 de Washington en novembre 2008 qu’un consensus s’est opéré autour de la nécessaire régulation des agences de notation afin notamment d’éviter les conflits d’intérêts et d’instaurer plus de transparence à l’égard des investisseurs.

Quelques mois plus tard, le règlement communautaire n° 1060/2009 du 16 septembre 2009 est adopté. Ses objectifs principaux concourent à s’assurer que, dans l’avenir, les évaluations seront indépendantes, objectives et de bonne qualité. C’est ainsi que ce règlement impose désormais aux agences de notation de disposer d’un agrément pour pouvoir exercer leurs activités dans l’Union Européenne et de se soumettre au contrôle des autorités nationales de supervision des pays concernés.

Ce règlement soumet par ailleurs les agences de notation à des règles de transparence (publication annuelle de leurs 20 plus gros clients et du chiffre d’affaires qu’ils génèrent, publication de leurs méthodologies, procédures, notations) et tend au renforcement de la qualité des notations par la mise en place de systèmes internes de contrôle.

Depuis le 1er janvier 2011, l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) est en France l’autorité compétente pour l’enregistrement et la supervision des agences de notation de crédit (article 10 de la Loi RBF). L’AMF peut désormais agréer, contrôler et sanctionner les agences de notation.

Par ailleurs, la responsabilité de ces agences pourra être engagée en cas de « fautes ou de manquements dans la mise en œuvre des obligations du Règlement » susvisé. Les agences devront faire face aux conséquences de leurs fautes en matière de notations et toute clause visant à exclure ou limiter cette responsabilité est nulle. En outre, la loi interdit la délocalisation des contrats entre une agence de notation et son client dans le but d’échapper à cette responsabilité.

2. Renforcement du contrôle et de la surveillance du secteur financier

L’objectif dans ce domaine était d’adapter le mode de supervision du secteur financier à la fois à la taille, à la complexité et à la dimension internationale des acteurs.

Ainsi, dans le prolongement du G20 de Washington, les chefs d’Etats et de gouvernement réunis à Londres en avril 2009 ont décidé que le Forum de stabilité financière – groupe économique informel créé en 1999 à l’initiative du G7 à la suite de la crise asiatique  – serait élargi aux membres du G20 et à l’Espagne. Il est  désormais dénommé « Conseil de la Stabilité Financière » et a pour ambitieuses missions d’évaluer des vulnérabilités du système financier, de favoriser la coordination et les échanges d’informations entre les autorités en charge de la stabilité financière, de suivre l’évolution des marchés et ses incidences sur la politique réglementaire en vue de parvenir à la stabilité financière, d’améliorer l’ouverture et la transparence du secteur financier.

Sur le plan européen, le Parlement a voté le 22 septembre 2010 un Règlement créant de nouvelles autorités européennes en matière de supervision bancaire, de l’assurance et des marchés (le Conseil européen du risque systémique et trois autorités européennes de supervision dotés de pouvoirs de surveillance et chargés de faire appliquer de façon harmonisée le droit communautaire).

En France, l’ordonnance n° 2010-76 du 21 janvier 2010 a créé une nouvelle autorité administrative indépendante, l’Autorité de contrôle prudentiel (ACP), chargée du contrôle des banques, des entreprises d’investissement et d’assurance ainsi que des intermédiaires dans les domaines de la banque et de l’assurance (cf. notre e-newsletter de février 2010).

La Loi RBF a ensuite adapté le dispositif français de supervision à l’architecture mise en place au niveau européen : le Conseil de régulation financière et du risque systémique réunit désormais, sous la présidence du ministre de l’Economie, toutes les autorités de contrôle, à savoir le Gouverneur de la Banque de France (également Président de l’ACP), le président de l’AMF, le président des normes comptables ainsi que trois personnes qualifiées dans les domaines considérés.

Ce conseil a notamment pour mission de veiller à la coopération et à l’échange d’informations entre les institutions que ses membres représentent, évaluer les risques systémiques du secteur et des marchés financiers et faciliter la coopération pour l’élaboration des normes européennes et internationales applicables au secteur financier.

L’AMF tient par ailleurs une place importante dans ce dispositif de supervision et de contrôle puisqu’elle voit ses pouvoirs fortement étendus. Ainsi, l’AMF peut désormais prononcer des sanctions jusqu’à hauteur de 100 millions d’euros à l’encontre de toute personne s’étant livrée à un abus de marché et de 15 millions à l’encontre de personnes physiques ayant agi pour le compte ou sous l’autorité d’un professionnel contrôlé par l’AMF. La Loi RBF autorise par ailleurs le président de l’AMF, en cas de circonstances exceptionnelles menaçant la stabilité du système financier, à prendre des dispositions restreignant les conditions de négociation des instruments financiers.